GUILLAUME
LEUNENS
Leunens, ou
la poésie du métal
Le peintre Guillaume
Leunens est un homme d’une sensibilité Fébrile. Il a épousé
son temps avec un enthousiasme sans réserves. Son exposition,
salle Péguy, constitue un chant et un hommage à ce qui caractérise
fondamentalement notre temps: le métal, dont l’emploi est encore
majeur dans notre civilisation moderne.
Plutôt que
de subir positivement le règne du métal, Leunens a cherché
à en pénétrer le système, comme pour en
débusquer les menaces qui y sont latentes.
Artisan, technicien,
mais également doué d’un tempérament généreux,
Leunens a voulu en quelque sorte, exorciser le métal - en l’occurrence,
l’aluminium, d’un maniement plus poétique et d’une matière
plus sobre et plus noble que d’autres métaux et le rendre plus propice
à l’homme en en dégageant la beauté qui y est incluse.
Un tel dessein l’a
conduit, après bien des recherches, à inventer un langage
nouveau pour que la matière se laisse pénétrer par
l’esprit de l’homme.
Évolution
toute naturelle d’un artiste qui, après avoir suivi, non sans originalité,
les routes de la peinture traditionnelle, a pris des sentiers encore inexplorés
et a abouti à l’exploration d’un monde nouveau: celui de la nuit
et des astres, pour lequel le grain et les caractéristiques
de l’aluminium convenaient admirablement. Il en a tiré des effets
qui laissent pantois les spectateurs.
Les grands
tableaux, où s’opposent la gamme variée des gris, allant
de l’argenté au sombre évoquent irrésistiblement des
mondes en gestation ou en opposition. Les lignes jaillissent avec
une fougue généreuse; les plaques de gris granuleux revêtent
des formes larges ou déchiquetées qui font penser à
des univers en évolution permanente. Le lyrisme du trait ou
de la ligne ou le jeu mathématique des courbes, ou encore les veinures
profondes, imposent à l’aluminium un sens qui le dépasse:
une fusion quasi mystique avec le cosmos ici rapporté.
A côté
des grands tableaux, il y a surtout des « monotypes » métalliques,
dont le style est identique, mais qui sont montés sur des feuilles
de papier. Ils ont été réalisés selon
une technique propre à Leunens; il est actuellement le seul peintre
à
posséder ce qui reste un « secret ». Les résultats
sont étonnants; chaque « monotype » dégage
un pouvoir d’émotion et de beauté dû à la maîtrise
avec laquelle Leunens a buriné le métal: aspérites,
inégalités, lumière, tout converge à restituer
la vertu poétique de l’aluminium. Gris nuancés, moins
durs ou profonds, s’allient dans un jeu subtil pour donner au petit tableau
une grâce et une séduction inattendues.
Ce qui frappe
, c’est l’unité profonde de l’inspiration qui, sans se répéter,
parce que fondée sur une observation inlassée de la réalité,
aboutit à des créations d’un style inimitable. Il ne
paraît pas excessif de conclure que Leunens est un de ces rares peintres
qui sont précurseurs d’un art tendu à exprimer le monde en
gestation autour de nous, dont il pressent avec une sensibilité
frémissante et une intelligence aiguë les grandes tendances
et qui les exprime avec la matière la plus apte à enclore
le maximum de chaleur humaine.
Reggui
(Orléans)
Entrée
du musée
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