Ouverture
de l'exposition
Guillaume
Leunens
Guillaume Leunens occupe une position originale dans le monde de la peinture. En premier lieu, ce peintre belge est né de parents ouvriers et il a été lui-même ouvrier dans une fonderie. Il a gardé de ses origines et de son passage à l’usine les qualités foncières du travailleur consciencieux, habile, respectueux de la matière qu’il emploie: couleurs ou métal. Son attitude face à la réalité est celle d’un être qui sait le prix inestimable de toute chose; son dessein est de l’exprimer dans sa complexité, certes, mais en la traversant d’un souffle créateur qui l’établit fermement et l’agrandit jusqu’à en constituer un univers de singulière beauté saisissante.
En second lieu, Guillaume Leunens, qui est un autodidacte, a découvert, par ses recherches personnelles, une technique qui ressortit: davantage au savoir-faire de l’artisan qu’à celui de l’artiste imbu de l’enseignement d’une quelconque école des Beaux-Arts. Ses tableaux, que nous ne verrons pas à l’exposition, et ses métaux sont le fruit des influences qu’il a subies au cours de ses visites dans les musées - celles de Breughel, van Gogh et Permeke - et de l’apprentissage technologique qui fut le sien durant son adolescence. De ce mélange entre le reçu et l’acquis est née une synthèse du faire qui trouve son accomplissement dans l’utilisation de l’aluminium, sous forme de grandes feuilles tendues sur un châssis. Elles ne manqueront pas de surprendre dès l’abord les visiteurs, mais l’oeil finit par entrer dans le jeu harmonieux des modulations qui vont du noir à l’argenté, en passant par toute une gamme de gris métalliques. Ce volontaire dépouillement, qui n’est pas sans analogie avec celui de la musique contemporaine, ne manque pas d’une certaine grandeur pathétique, en dépit du matériau employé: l’aluminium.
C’est dans
ce choix que réside la dernière originalité de Guillaume
Leunens: avoir admirablement exprimé, à travers le «
métal » buriné, les deux notions fondamentales de la
peinture: l’espace et le mouvement. Il y parvient par une série
de bosses et de creux, traversés de zébrures en tous sens
qui captent la lumière et la restituent dans des tons différents,
dont le chatoiement assombri dessine toutes sortes de variations qui accusent
le relief et le rendent palpable et mouvant. L’impression dominante
est celle d’un univers météorique qui reflète déjà
le monde pressenti par l’anticipation.
Guillaume
Leunens a exposé, à plusieurs reprises, à Bruxelles,
notamment le mois dernier, à Paris, à Tunis et en Espagne.
L’inauguration de son exposition à Orléans aura lieu ce vendredi,
à 16 heures, salle Péguy, en présence du peintre,
qui dialoguera volontiers avec les visiteurs cet après-midi et samedi.
Reggui, Orléans, La république du Centre, 15 mars 1968.